

Bruxelles veut élaguer sa loi contre la déforestation, enlisée dans les reports
La Commission européenne a proposé mardi d'assouplir sa loi phare contre la déforestation, notamment en réduisant drastiquement les obligations pesant sur les plus petites entreprises, afin de faciliter sa mise en œuvre qui a connu de multiples couacs.
Ce texte emblématique, jugé pionnier par les ONG environnementales, vise à interdire la commercialisation en Europe de produits comme l'huile de palme, le cacao, le café, le soja et le bois issus de terres déboisées après 2020.
Il crée un système de traçabilité de ces produits à l'aide de données satellitaires et de géolocalisation.
Cette loi est toutefois dans le viseur de l'industrie agroalimentaire et de nombreux Etats africains, asiatiques et sud-américains depuis plusieurs années qui lui reprochent d'imposer des contraintes administratives démesurées.
Son entrée en vigueur avait déjà été reportée d'un an, à fin 2025, et la Commission avait demandé en septembre un report supplémentaire d'un an, Bruxelles invoquant des problèmes informatiques.
L'exécutif européen avait expliqué que le système prévu pour gérer la traçabilité des produits n'était pas prêt pour traiter l'énorme masse de données attendue.
Mais la Commission propose désormais de réduire ce nouveau délai à six mois, en limitant fortement les obligations imposées aux petites et micro entreprises concernées par cette législation.
Ainsi, les petits exploitants agricoles auraient juste à s'enregistrer via une procédure simplifiée, s'ils ne sont pas déjà identifiés dans une base nationale ou européenne.
En outre, les entreprises qui se contentent de transformer ou revendre des produits respectant déjà la législation n'auraient plus à produire à leur tour des déclarations de conformité.
- "Des millions d'hectares perdus" -
Cela répond aux inquiétudes soulevées par de nombreuses sociétés qui redoutaient de subir un nouveau fardeau réglementaire.
Grâce à cette série d'allégements, la Commission estime que le système informatique qu'elle a mis en place sera assez robuste pour permettre une entrée en vigueur de la législation plus rapide que ce qu'elle avait demandé en septembre: l'application des règles serait reportée de six mois (et non plus douze) pour les moyennes et grandes entreprises, soit au 30 juin 2026.
Ces aménagements ont été diversement accueillis, certains y voyant une édulcoration de la loi initiale, d'autre saluant une solution qui va permettre qu'elle soit enfin mise en oeuvre.
"C'est une bonne nouvelle que la Commission ait rejeté les appels à reporter la loi pour tout le monde", a estimé Nicole Polsterer, chargée de campagne au sein de l'ONG Fern.
"L'UE affaiblit la loi sur la déforestation", a au contraire déploré l'eurodéputée écologiste belge Sara Matthieu.
"Chaque année de retard, ce sont des millions d'hectares de forêts qui sont perdus", a-t-elle ajouté sur le réseau Bluesky, ajoutant que cela revenait à "punir" les groupes comme Nestlé ou Ferrero qui avaient joué le jeu et dépensé de l'argent pour rendre leurs approvisionnements plus durables.
Après avoir adopté durant plusieurs années des mesures très ambitieuses, l'Union européenne a mis un coup de frein à certains de ses projets sur le climat pour donner un peu d'air aux entreprises, soumises à une concurrence mondiale féroce.
U.al-Salman--BT